À une époque marquée par la vitesse, la connexion permanente et une surcharge constante d’informations, il est parfois nécessaire de faire une pause. Revenir à soi. Se réancrer. Et dans ce tumulte quotidien, les mots, ceux que l’on lit, deviennent une porte vers un espace de calme et de présence. La lecture ne relève pas seulement du loisir ; elle peut être un véritable outil d’ancrage, de recentrage et de reconnexion à l’essentiel.

Pourquoi avons-nous besoin d’un retour à l’essentiel ?

Face à une société qui valorise la productivité, l’urgence et l’instantanéité, nous avons perdu l’habitude de ralentir. Les sollicitations numériques, les notifications, les réseaux sociaux et le rythme soutenu de nos journées installent progressivement une forme de fatigue mentale, souvent invisible mais pourtant bien réelle.

Cette saturation entraîne chez beaucoup d’entre nous un sentiment de déconnexion de soi. Le stress, l’anxiété, la perte de concentration ou de créativité ne sont pas rares. Revenir à l’essentiel devient alors une nécessité, et non un luxe. Cela signifie se délester du superflu pour retrouver ce qui a du sens, ce qui nourrit profondément. Et parmi ces piliers : les mots, porteurs d’émotion, de pensée et de beauté.

Lecture et ancrage : comment les mots nous recentrent

Lire, c’est exiger une chose essentielle : du temps. Du temps pour soi, pour se plonger dans un univers, découvrir une voix, se laisser traverser par des émotions. La lecture ne se peut pas être passive ; elle engage toute la présence du lecteur. Et c’est précisément là que réside sa puissance d’ancrage.

En lisant, on ralentit. On entre dans un autre rythme — celui du texte. On se concentre sur une seule tâche à la fois. Cette capacité à se concentrer pleinement, même quelques minutes par jour, est un exercice de recentrage. C’est aussi une manière d’apprendre à rester en contact avec le présent, d’apprivoiser le silence intérieur. Certaines approches voient même dans la lecture une forme de méditation.

Des études publiées dans des revues comme Journal of College Teaching and Learning ou The Reading Teacher confirment l’effet apaisant de la lecture : baisse de la fréquence cardiaque, réduction des niveaux de stress, amélioration du taux de concentration. Lire, c’est s’offrir un espace mental protégé, serein, dans lequel le monde extérieur se tait enfin.

Quels types de lectures favorisent l’ancrage ?

Toutes les lectures n’ont pas le même impact. Si chaque lectrice a ses préférences, certaines formes d’écriture semblent plus propices à cette fonction de retour à soi.

• La poésie : Avec sa densité émotionnelle et ses images symboliques, la poésie agit directement sur les sens. Les mots choisis, le rythme, la musicalité du texte poussent à une lecture lente, attentive. Un poème de Paul Éluard ou de Louise Labé peut, en quelques lignes, ouvrir un monde en nous.
• Les textes introspectifs : Journal intime, romans d’apprentissage, récits autobiographiques… Ces textes invitent souvent à une forme de résonance intérieure. Des autrices comme Annie Ernaux ou Marguerite Duras offrent une écriture qui touche à l’intime et favorise l’écho émotionnel.
• La littérature contemplative : Certains ouvrages centrés sur la nature, le passage du temps, les saisons, aident à reconnecter avec le corps et l’environnement. On pense à l’œuvre de Sylvain Tesson, ou encore à Walden de Henry David Thoreau dans sa version traduite.

Il n’est cependant pas nécessaire de rechercher en permanence des lectures profondes : un roman doux, une aventure bien écrite ou même un album illustré peuvent très bien jouer ce rôle si leur lecture nous absorbe entièrement.

Créer un rituel de lecture pour se reconnecter au présent

La mise en place d’un rituel de lecture — un moment régulier, intentionnel — est l’un des moyens les plus efficaces pour cultiver cet ancrage. Il ne s’agit pas simplement de lire dès que l’on a cinq minutes, mais de sanctuariser un espace dédié à cette pratique. Cela peut être le matin, pour bien débuter la journée. Nous l’explorons en profondeur dans cet article.

Voici quelques conseils pour créer ce moment :

• Choisir un lieu calme : un coin de canapé, un fauteuil près de la fenêtre, un balcon ou une terrasse. L’idée est d’associer un endroit physique à l’acte de lire.
• S’entourer d’objets apaisants : une tasse de thé, une couverture douce, une bougie, une plante. Vous pouvez même penser à créer une capsule de lecture adaptée à vos besoins intimes.
• Désactiver les distractions : téléphone en mode avion, notifications coupées, tablette hors de portée.
• Laisser de l’espace après la lecture : quelques minutes de silence, un carnet pour noter une phrase marquante, ou une courte méditation pour intégrer ce qui a été lu.

En instaurant ce rituel quotidien ou hebdomadaire, on transforme la lecture en une pratique de reconnexion. C’est un retour vers le lent, vers l’authentique, vers soi-même.

Revenir à soi grâce aux lectures de transition

Certaines périodes de la vie, particulièrement chargées émotionnellement — déménagement, rupture, fatigue mentale, changement de carrière — exigent de nous une forme d’adaptation et de flexibilité. Dans ces moments de transition, la lecture peut devenir un précieux soutien. Elle agit comme un miroir ou un guide.

Certains livres accompagnent, posent des questions, ouvrent des réflexions. Ce sont des lectures à la fois douces et puissantes, qui aident à traverser. Nous vous proposons ici une sélection de livres idéale pour ce type de période.

Lire pour se (re)connecter à sa féminité

Lire peut aussi jouer un rôle fondamental dans la redécouverte de sa part féminine, dans tout ce qu’elle a de puissant, de sensoriel, de créatif. Les histoires de femmes écrites par des femmes ont cette capacité à éveiller ce qui sommeille en nous. C’est l’un des axes que nous explorons dans notre article consacré à la littérature et à la féminité.

Que ce soit à travers des personnages inspirants, des récits de sororité, ou des questionnements autour du corps et de l’émotion, chaque mot peut renforcer ce lien avec soi, avec les autres femmes, et avec notre humanité partagée.

Conclusion : la lecture comme boussole intérieure

Revenir à l’essentiel grâce aux mots, c’est choisir de se réapproprier un espace de présence. Dans le livre que l’on ouvre, on se retrouve. Dans les pages tournées, dans les phrases lentes et belles, se cache une voie de recentrage. La lecture devient alors un acte de douceur, de force et de transformation. Une boussole intérieure qui nous oriente, malgré la tempête extérieure, vers ce qui compte vraiment.

Et vous, quels mots vous ancrent dans l’instant ?