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Pourquoi Katherine Mansfield écrivait exclusivement en peignoir de soie

Katherine Mansfield, figure incontournable de la littérature moderniste, n’a jamais cessé de fasciner les lecteurs et les lectrices par l’intensité poétique de ses nouvelles et la subtile intériorité de ses personnages. Mais au-delà de son œuvre, c’est aussi son processus créatif et ses rituels d’écriture qui éveillent aujourd’hui encore la curiosité. L’une des anecdotes les plus intrigantes reste son habitude d’écrire exclusivement vêtue d’un peignoir de soie. Ce choix vestimentaire, loin d’être anecdotique, relève d’un rapport profond entre l’écriture, le corps, et le textile.

Le peignoir de soie : un vêtement de transition propice à la création littéraire

Dans l’imaginaire collectif, le peignoir est souvent associé au confort domestique, au relâchement, voire à l’entre-deux moments de la journée. Pour Katherine Mansfield, il semble avoir joué un rôle de sas symbolique entre le monde extérieur et son espace intérieur d’écriture.

Vivre dans la soie, c’était pour elle non seulement une manière de se protéger du chaos du monde, mais aussi de mettre son corps dans un état d’accueil de la pensée et de l’émotion. La soie, matière noble et vivante, épouse les formes et les mouvements avec légèreté. Elle n’entrave pas – au contraire, elle accompagne. En cela, elle peut être perçue comme un catalyseur sensoriel de la concentration et de l’inspiration.

De nombreux écrivains ont eu des rituels vestimentaires pour écrire. On sait par exemple que Victor Hugo s'enfermait parfois nu pour ne pas sortir de chez lui et rester concentré. Le peignoir de Katherine Mansfield s’inscrit dans cette tradition de choix vestimentaires significatifs, presque sacrés, dans la fabrication du livre.

Un acte d’émancipation féminine à travers le vêtement

Le fait que Mansfield écrivait en peignoir de soie n’est pas sans résonance avec son époque. Dans un début de XXe siècle encore profondément patriarcal, choisir d’écrire en tenue d’intérieur luxueuse et fluide pouvait être perçu comme un geste d’autonomie et de transgression silencieuse.

La soie, traditionnellement associée au luxe, à la féminité et à une certaine forme d’indolence, devient entre les mains de Mansfield un objet de pouvoir. Dans l’intimité de sa chambre ou de ses salons, ce vêtement devient presque un manifeste : celui d’une femme qui refuse le corset mental, moral et textile imposé aux femmes de son temps.

Dans une époque où l’on attendait des femmes qu’elles restent discrètes, utiles, modestes, l’acte même d’écrire – et de le faire dans une tenue parfois jugée indécente ou frivole – pouvait déjà être vu comme un combat personnel. De ce point de vue, Katherine Mansfield peut être rapprochée d'autres figures féminines comme Anaïs Nin, dont la garde-robe aussi exprime une forme d'insubordination esthétique.

Katherine Mansfield et la correspondance entre textile et texture littéraire

La matière et les tissus ne sont pas seulement des décors ou des accessoires dans l’univers des écrivains ; ils sont souvent intégrés à la structure même de la pensée. Pour Mansfield, le contact de la soie aurait pu influer sur la manière dont elle exprimait ses émotions ou construisait la texture de ses phrases.

La finesse de la soie rappelle celle de son écriture : délicate mais incisive, flottante mais précise, douce en surface mais animée d’une intensité crépitante. Porter de la soie pour écrire n’était donc peut-être pas qu’une question de confort : c’était aussi une manière littérale et symbolique d’habiter une esthétique. Chaque frottement du tissu contre sa peau, chaque frisson textile, pouvait entrer en résonance avec une phrase en train de naître.

Le rapport entre le vêtement et la créativité est d’ailleurs un thème que l’on retrouve chez d’autres femmes de lettres. Alfonsina Storni, par exemple, utilisait certaines étoffes pour stimuler son imagination et plonger dans ses émotions les plus profondes. Mansfield appartenait à cette lignée de femmes pour qui le confort esthétique était une condition de la création littéraire estivale.

Une réponse à la maladie et à la fatigue chronique

La biographie de Katherine Mansfield révèle une santé fragile dès sa jeunesse. Atteinte de la tuberculose, elle connut des périodes d'épuisement physique intense, rythmées par des séjours en sanatorium. Dans ce contexte, le choix du peignoir de soie prend une dimension plus profonde : celle d’un vêtement-thérapeutique, capable de réconcilier le corps souffrant et l’acte d’écrire.

Au lieu d'un vêtement formel ou contraignant, elle privilégiait l’aisance extrême, la douceur contre la peau, pour compenser un quotidien rythmé par la douleur ou la fatigue. Le peignoir devenait un écrin de légèreté dans lequel elle pouvait suspendre un temps la réalité morne de la maladie.

Là encore, elle rejoint d’autres auteures pour qui l’habit devient pansement ou ressource dans l’effort d’écrire. Dans notre article sur Sylvia Plath, on observe comment certains objets personnels, portés ou regardés, soutenaient le fragile équilibre de son énergie créative.

Quand le vêtement sublime l’écriture : un héritage encore palpable

Le lien entre la matière textile et la création littéraire se révèle donc non pas comme un caprice ou un détail biographique, mais comme une véritable méthode d’entrée en littérature. Le peignoir de soie de Katherine Mansfield incarne une manière de se rendre disponible : à soi, à l’imaginaire, à l’intuition. Il autorise la vulnérabilité du corps pour permettre la transparence de l’esprit.

Son exemple continue d'inspirer de nombreuses créatrices contemporaines qui cherchent à créer depuis un espace de soin et de sensorialité. Mansfield nous rappelle, avec pudeur mais aussi avec force, que la créativité ne naît pas seulement d’un bon stylo ou d’un carnet, mais aussi de l’environnement sensoriel que l’on tisse autour de soi.

Dans cette exploration intime de l’habit comme extension de la pensée, Mansfield rejoint un cercle restreint de femmes de lettres dont la garde-robe devient un prolongement de la voix. Comme Louisa May Alcott ou Alfonsina Storni, son lien au textile révèle un langage secret entre l’être et l’écriture. Un langage que de nombreuses lectrices d’aujourd’hui, sensibles à la puissance discrète des étoffes et au soin de soi, peuvent encore entendre.

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