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Le code vestimentaire volontairement provocant de Gertrude Stein

Gertrude Stein, une figure littéraire au style déroutant

Dans le panorama de la littérature moderniste du XXe siècle, Gertrude Stein dénote par sa prose expérimentale, mais aussi par l'image qu'elle renvoie d'elle-même. Loin d'adopter les codes vestimentaires traditionnels de son époque — ceux imposés aux femmes dans le Paris des années 1920 et 1930 — Stein choisit de construire sa propre grammaire esthétique. Elle affiche une silhouette masculine assumée : cheveux courts, habits amples, tissus bruts. Un langage vestimentaire cohérent avec l'audace de sa pensée, que ses contemporains qualifiaient tour à tour d'androgyne, de subversif ou d'incompréhensible.

Contrairement à d’autres auteures comme Anaïs Nin ou Katherine Mansfield dont les vêtements magnifiaient une forme de féminité sensuelle ou introspective, Stein s’inscrivait dans un contre-discours. Elle choisissait des vêtements perçus comme austères, refusant l’ornement et l’élégance décorative au profit de l'épure et du confort, ce qui, en soi, tenait du geste politique.

Une approche vestimentaire influencée par ses convictions artistiques

Stein était profondément engagée dans l’avant-garde artistique et littéraire. Sa maison de la rue de Fleurus, qu’elle partageait avec sa compagne Alice B. Toklas, servait de salon pour les artistes de l’époque : Picasso, Matisse, Hemingway, Fitzgerald. Ce n’était pas une coïncidence que son apparence visuelle traduise exactement cette posture radicale : tout, chez elle, devait déborder le cadre imposé. Le style vestimentaire de Stein est à lire comme une extension de sa pensée esthétique, qui, rappelons-le, a influencé les courants cubistes et surréalistes.

Sa tenue typique : une jupe longue et épaisse, un chemisier sobre sous une veste ample, un col montant remplacé parfois par un foulard utilitaire, traduit un refus ouvert du regard masculin standardisé. Son apparence évoque davantage une érudite qu'une muse. Dans certains portraits réalisés par Man Ray ou Cecil Beaton, elle pose frontalement, les bras croisés ou les traits sévères. Elle impose au regard une résistance, une désobéissance vestimentaire pleinement revendiquée.

Vêtement et pouvoir : l’affirmation d’un genre indéfini

Chez Gertrude Stein, la question du genre est centrale et déborde largement le prisme biographique. Elle ne se cache ni de son homosexualité, ni de sa vie de couple avec Alice B. Toklas, une rare transparence pour l’époque. À travers son apparence, elle brouille volontairement les frontières du masculin et du féminin. Ses vêtements évoquent ceux d’un homme de lettres ou d’un intellectuel bourgeois du XIXe siècle, et ce n’est pas un hasard.

Porter une tenue masculine dans les années 1920 pour une femme, ce n’était pas adopter une mode androgyne ou non genrée comme on l’entend aujourd’hui. C’était transgresser un ordre social et symbolique. Stein savait que cette apparence provoquait ; elle ne l’atténuait pas. Elle la renforçait : coupe de cheveux courts, chaussures solides, presque orthopédiques, négligence apparente du maquillage et des accessoires. Son style est un manifeste vestimentaire. Une déclaration que le talent et la pensée ne nécessitent aucun artifice genré pour exister.

Une influence silencieuse mais déterminante

Si aujourd’hui son apparence peut paraître sobre voire banale, il faut se replacer dans le contexte d’une époque où les femmes en pantalon pouvaient encore être arrêtées à Paris. Stein ne cherchait pas à choquer : elle imposait. Et cela fut remarqué. On retrouve chez certaines autrices une inspiration indirecte. Louisa May Alcott, bien plus ancienne, utilisait ses robes comme une métaphore de sa liberté intérieure. Un siècle plus tard, les choix vestimentaires de Stein influencent des créatrices qui pensent la mode comme langage, comme Frida Kahlo le fera, à sa manière, au Mexique.

Plus encore, son style austère a anticipé certaines tendances de la mode intellectuelle : les chemises surdimensionnées à la Simone de Beauvoir, les coupes sobres et fonctionnelles valorisées par les mouvements féministes des années 1970. Son influence traverse le siècle presque à bas bruit, captée çà et là par des femmes qui ont vu dans cette simplicité un levier d’émancipation.

Héritage et modernité : Gertrude Stein à l’ère de la slow fashion

En refusant l’excès, la consommation vestimentaire frivole, Stein semble aussi annoncer les préoccupations contemporaines de la slow fashion. Porter peu, porter juste. Miser sur l’intention plus que sur la séduction. Choisir des matières robustes, s’inscrire dans une forme de sobriété volontaire. Pour la lectrice moderne, soucieuse de son apparence mais aussi de sa singularité intellectuelle, le style de Stein propose une leçon profonde : se vêtir n’est jamais neutre.

Son cas interroge cette idée reçue selon laquelle la féminité doit forcément passer par l'élégance esthétique. Et si la force de pensée se disait aussi par le refus d’attirer le regard ? En cela, Stein n’appartient pas seulement au passé : elle s’adresse à nous encore aujourd’hui. Aux lectrices qui cherchent dans leurs garde-robes non un accessoire de conformité sociale, mais un outil de langage personnel. Aux femmes en quête d’un style aligné avec leur pensée.

Conclusion : un vestiaire comme œuvre en soi

Le style vestimentaire de Gertrude Stein n’est pas une coquetterie, ni une provocation gratuite. Il agit comme un texte parallèle à son œuvre, partageant les mêmes contours de radicalité, de constance et de refus des codes figés. En l’observant sans nostalgie mais avec lucidité, on perçoit combien les vêtements peuvent devenir des outils poétiques et politiques à part entière.

Pour celles qui peuplent aujourd’hui l’univers du book club, débattant de littérature autant que de style, Stein inspire une posture militante : celle de ne rien porter qui ne soit choisi, pensé, revendiqué. Son exemple nous rappelle à quel point un style peut être une façon d’écrire – avec du tissu autant qu’avec des mots.

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