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La correspondance troublante entre Sylvia Plath et ses objets préférés

Figure incontournable de la poésie du XXᵉ siècle, Sylvia Plath fascine encore aujourd’hui autant par la force de son œuvre que par la complexité de sa vie intérieure. Connue pour La Cloche de détresse (The Bell Jar) et ses poèmes poignants, l’autrice américaine a entretenu un rapport intime et profond avec certains objets de son quotidien. Ces objets, bien plus que de simples instruments ou accessoires personnels, semblent avoir joué un rôle déterminant dans sa création littéraire. Dans cet article, nous partons sur les traces des possessions qui ont accompagné Sylvia Plath dans sa quête artistique.

Le carnet de cuir noir : un sanctuaire de mots

Parmi les objets les plus emblématiques de Sylvia Plath, son carnet de cuir noir est sans doute le plus symbolique. Ce carnet, qu'elle emportait presque partout avec elle, était le réceptacle de ses pensées les plus brutes, de ses poèmes à peine esquissés, mais aussi de ses listes, rêves ou réflexions. En soi, il était une extension de son esprit, un espace tangible pour y déposer l’intangible.

L'archivage de ses journaux intimes, publié partiellement par sa fille Frieda Hughes (The Journals of Sylvia Plath), révèle à quel point le carnet manuscrit faisait partie de sa routine. Chaque page exsude une lutte intérieure entre sa volonté de perfection et son besoin de s’exprimer sans filtre, entre le chaos et l’ordre.

En cela, elle partage un usage très personnel de l'écriture intime comparable à celui de Anaïs Nin, qui, elle aussi, utilisait la tenue de journaux pour explorer et comprendre son intériorité.

Sa machine à écrire Smith Corona : une complice silencieuse

À l’époque où peu d’outils numériques existaient, la machine à écrire incarnait plus qu’un simple outil de travail : elle représentait le lien direct entre l’idée et le texte, entre le mental et le tangible. Sylvia Plath en faisait un usage quotidien, le rythme du clavier martelant le tempo de ses inspirations soudaines.

Sa relation avec sa Smith Corona était presque charnelle. Elle l’emmenait avec elle à Cambridge et plus tard à Devon lors de son séjour avec Ted Hughes. Le bruit mécanique semblait stimuler son esprit rigide et méticuleux, contribuant à cette écriture percutante et cadencée que l’on retrouve dans Ariel et Daddy.

Le rituel de l’écriture sur machine se rapprochait d’une discipline quasi militaire, quelque chose que Gustave Flaubert aurait probablement compris, lui qui vouait un culte obsessionnel au mot juste.

Le tablier de cuisine : entre domesticité et subversion

Peu de gens imaginent Sylvia Plath en tablier, et pourtant, elle n’était pas étrangère aux tâches domestiques. Dans des lettres et journaux, elle évoque sa fascination presque compulsive pour la cuisine, le ménage, et la vaisselle. Son tablier, souvent décrit comme à motifs floraux, n’était pas simplement un vêtement utilitaire : il lui permettait de jouer temporairement le rôle de la femme au foyer modèle tout en ruminant des vers profonds sous la surface.

Cet écart entre apparence et vérité, entre rôle social et vie intérieure, se retrouve dans bien des éléments de sa poésie. Le tablier traduisait à la fois la performance sociale et le camouflage de sa révolte. Un paradoxe que l’on retrouve également chez d’autres autrices de sa trempe, comme Louisa May Alcott, qui jonglait aussi entre conventions et rébellion.

Le miroir de la chambre : un objet de confrontation

Le miroir est un motif récurrent dans l’œuvre poétique de Sylvia Plath, et il prend la forme la plus littérale dans son quotidien. Un petit miroir encadré de bois, présent dans sa chambre, était l’objet silencieux de nombreuses confrontations avec elle-même. Ce miroir, elle le mentionne même dans son poème emblématique, Mirror, où elle écrit :

"I am silver and exact. I have no preconceptions. / Whatever I see I swallow immediately"

Le miroir devient ici un double symbolique, un témoin brutal du passage du temps, de ses douleurs, de sa quête d’identité. Il ne s’agissait pas pour elle de narcissisme mais d’une tentative d’objectivité crue : se voir sans artifice, dans l’attente, la fatigue, ou le désespoir. C’est un objet qui, tout autant que le carnet ou la machine, nourrissait sa production littéraire.

Les vêtements : de la protection à l’expression de soi

Comme de nombreuses femmes écrivaines, Sylvia Plath accordait soin et attention à ses vêtements. Non pas par frivolité, mais parce que ces derniers faisaient partie intégrante de son identité et de son humeur du jour. Dans ses lettres, elle parle d’un pull “tricoté par sa mère” qu’elle portait souvent lorsqu’elle écrivait à la maison, ou d’une robe bleue qu’elle associait à une journée d’inspiration

Ce rapport presque synesthésique entre textures, couleurs et créativité n’est pas sans rappeler celui de Alfonsina Storni, qui utilisait les étoffes comme déclencheurs d’écriture. Chez Plath, choisir ses habits avant d’écrire relevait d’un rituel esthétique nécessaire à la mise en état.

Conclusion : Une intimité construite par les objets

Ce qui transparaît de l’examen des objets préférés de Sylvia Plath, c’est un univers de rituels, de textures, de liens silencieux entre son espace physique et son esprit littéraire. Que ce soit un carnet, une robe, un miroir ou une machine à écrire, chacun de ces éléments incarnait une fonction : déclencher, canaliser ou symboliser l’acte d’écrire.

Pour les lectrices d’aujourd’hui, revisiter l’univers matériel d’une autrice aussi marquante, c’est non seulement mieux comprendre son œuvre, mais également plonger dans nos propres relations aux objets qui peuplent notre quotidien. Sylvia Plath nous invite à observer ce qui nous entoure, non pas comme des éléments utilitaires, mais comme des partenaires silencieux de notre expression intérieure.

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