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Ce que le film Vers la beauté de David Foenkinos pourrait capturer du roman

Adapter un roman au cinéma est toujours un exercice périlleux, surtout lorsqu'il s'agit d'une œuvre aussi introspective et chargée d’émotion que Vers la beauté de David Foenkinos. Sorti en 2018 aux éditions Gallimard, ce roman a touché de nombreux lecteurs par sa pudeur et sa sensibilité, en abordant avec délicatesse les thèmes du deuil, de la reconstruction et de la puissance cathartique de l’art. L’annonce d’une potentielle adaptation cinématographique soulève alors une question essentielle : qu’est-ce qu’un tel film pourrait réellement capturer de l’expérience littéraire profondément intime proposée par le texte original ?

La richesse émotionnelle au cœur du roman Vers la beauté

Dans Vers la beauté, David Foenkinos met en scène Antoine Duris, ancien professeur aux Beaux-Arts de Lyon, qui abandonne subitement sa vie pour devenir gardien de musée au Musée d’Orsay. Ce choix énigmatique cache une douleur intime que le roman dévoile progressivement, au fil des pages. Le récit alterne entre Antoine et Camille, une jeune femme marquée par un traumatisme profond. Lentement, leurs trajectoires se croisent autour de l’univers de l’art, qui devient un refuge, un langage commun et une voie vers la résilience.

Ce qui marque dans le texte, c’est la finesse du style de Foenkinos. Parcimonieux, pudique, il donne à voir les tourments intérieurs sans les nommer frontalement. Le roman est tout en retenue, ponctué d’ellipses qui laissent au lecteur l’espace pour interpréter, ressentir, compléter. Adapter un tel texte nécessite donc une approche cinématographique tout aussi nuancée, capable de transmettre sans appuyer, de montrer sans expliquer.

Ce que le cinéma peut restituer de la beauté silencieuse du roman

Le médium cinématographique possède sa propre grammaire émotionnelle. Le regard d’un acteur, la lumière sur un visage, la musique, l’architecture d’un musée : autant d’éléments qui créent de la narration. Si l’adaptation prend le parti de conserver cette lenteur et cette introspection, elle pourrait transcrire avec justesse le silence traversé par Antoine. Imaginer les salles du Musée d’Orsay filmées à la manière de ce qu’a fait Patricio Guzmán dans Le bouton de nacre, c’est déjà approcher quelque chose de cette communion entre art et souffrance que le livre incarne.

À l’image de ce que le film Room a pu faire pour retranscrire l’intimité du roman d’Emma Donoghue, le futur film adapté de Vers la beauté devra miser sur une mise en scène épurée et expressive. Le non-dit est partout dans le livre, et l’image peut jouer un rôle central pour montrer plutôt que dire. En misant sur une direction d’acteurs sobre, puissante et incarnée, le film pourrait révéler les failles des protagonistes tout en respectant la pudeur du style.

Le risque d’une simplification émotionnelle dans une adaptation linéaire

Un des risques majeurs d’une adaptation est de passer à côté de la complexité émotionnelle du roman en en proposant une lecture trop linéaire. Le roman alterne entre plusieurs temporalités, entre les voix d’Antoine et de Camille. Ces allers-retours permettent de construire progressivement une empathie, de comprendre les personnages dans leur profondeur psychologique. Le film devra trouver des équivalents narratifs à cette structure pour ne pas tomber dans une narration plate.

Ce danger s’est déjà vu dans d’autres adaptations. Rappelons par exemple que le film tiré de Shantaram a été critiqué pour avoir schématisé un récit riche et spirituellement dense. Le défi sera donc grand mais pas insurmontable, à condition de respecter le rythme du récit originel, ses silences, et ses respirations.

Symbolique de l’art et des œuvres dans l’écriture de Foenkinos

Certaines pages de Vers la beauté sont de véritables méditations sur des tableaux. Antoine, devenu gardien de musée, s’absorbe dans la contemplation d’œuvres qui résonnent profondément avec ce qu’il vit intérieurement. Le film pourra capitaliser sur cette dimension visuelle, en montrant les œuvres mêmes qui apaisent ou bouleversent les personnages. La peinture, la sculpture, la lumière des galeries : tout cela constitue déjà une matière cinématographique.

C’est un exemple rare, où la littérature lui-même se fait regard. En cela, le dialogue entre l’écrit et le visuel est presque déjà inscrit dans le roman. Ce serait ainsi l’occasion pour le cinéma de rendre à l’art une place centrale dans le récit, comme le film Au revoir là-haut l’a brillamment fait pour l’univers pictural d’Édouard Péricourt.

Un style minimaliste difficilement traduisible

David Foenkinos a un style singulier : des phrases courtes, un rythme rapide, parfois abrupt, qui crée un ton de narration détaché, presque clinique, mais d’une immense subtilité dans son ressenti. Porter ce style à l’écran pourrait nécessiter un choix fort, peut-être une voix off comme dispositif narratif. Mais cela comporte aussi un risque, celui de trop expliciter ce qui faisait précisément la force du roman : le sous-entendu.

L’absence de pathos dans l’écriture, même lorsqu’elle traite de sujets tels que l’agression, la dépression ou le suicide, rend la lecture de Vers la beauté bouleversante sans être sentimentale. Le film devra donc se garder d’un excès d’émotions là où le roman choisissait le retrait. Une approche qui rappelle celle du film Les souvenirs de Marnie, adapté du roman de Joan G. Robinson dans lequel la sobriété visuelle et narrative renforçait l’émotion.

Conclusion : entre fidélité et réinterprétation sensible

Adapter Vers la beauté au cinéma nécessite de faire des choix esthétiques délicats. Il ne s'agit pas de reproduire fidèlement chaque élément du livre, mais d’en respecter l’essence : cette traversée du chagrin, cette quête de sens, cette confiance retrouvée dans la force réparatrice de l’art. Si le film parvient à conserver ce souffle intérieur, alors il aura capturé quelque chose de fondamental de l'œuvre de Foenkinos.

Et pour celles qui aiment mesurer les écarts entre page et écran, ou simplement revivre autrement une œuvre qui les a touchées, cette adaptation à venir pourrait bien être l’occasion d’une nouvelle rencontre avec Antoine, Camille, et leur lente remontée vers la lumière. Une expérience sensible, visuelle et littéraire qu’aucune lectrice passionnée ne voudra manquer.

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